Dans les régions de plaine, les Primevères les plus communes appartiennent à la section Vernales, la section Auricula est plutôt montagnarde. Il existe par exemple, trois espèces de Primula en Sarthe. On ne présente plus le Coucou (Primula veris L.) ni la Primevère acaule (Primula vulgaris Hudson) mais on peut évoquer un peu plus précisément la troisième : la Primevère élevée (Primula elatior (L.)Hill) plus rare. C’est une espèce forestière ou de lisière portant sur une tige unique un petit bouquet de fleurs jaune-pale penchant gracieusement d’un côté. Les corolles ni en clochettes, ni franchement étalées, leur couleur d’un jaune ni très pâle, ni d’un jaune lumineux, en font une sorte de moyen terme entre les deux autres et surtout, les calices ne sont pas enflés comme chez le coucou.
Je n’ai pas de photo pour illustrer ces différences mais pour comparer la Primevère élevée et le Coucou, voici une planche idéale de H.G.L. Reichenbach, dans le vol.17 de son ouvrage "Icones florae Germanicae et Helveticae".
Tout le monde connait bien le Coucou, mes photos sarthoises montrent qu’il possède aussi un bouquet unilatéral et que les calices ne s’emboitent pas sur le tube de la corolle mais sont au contraire très lâches.
La Primevère acaule (photos en Bretagne), a un port beaucoup plus ramassé, une fleur unique sur une tige courte et les corolles bien étalées sont parfois presque blanches. On voit là que les jeunes feuilles sont très gaufrées avec des bords révolutés, c’est un critère commun aux trois espèces; au cours de la floraison les feuilles ont tendance à s’aplanir.
Les hybrides naturels de ces trois espèces sont donc logiquement au nombre de trois, officiellement nommés :
- Primula x digenea (P.vulgaris par P.elatior)
- Primula x media (P.elatior par P.veris)
- Primula x polyantha (P.vulgaris par P.veris)
Primula x polyantha
En fait, ce dernier serait le plus fréquent du moins en Sarthe. Les territoires des trois espèces s’y recouvrent peu ; les parents sont en présence surtout dans l’Ouest du département car la primevère acaule se localise de préférence sur le massif armoricain, et le coucou est plus fréquent dans le Centre et l’Est de la Sarthe. Cet hybride présente un aspect très variable et ressemble parfois beaucoup à la primevère élevée. Je l’ai photographié en 1991 en Charnie au bord du Palais au cours d’une sortie botanique.
On nous fit remarquer sa robustesse, ses clochettes plus larges et plus pâles que sur le Coucou, son bouquet restant dressé sur une tige bien plus haute que celle de la primevère acaule mais non penché en position unilatérale comme sur le Coucou ou la Primevère élevée.
En 1905, le botaniste sarthois Ambroise Gentil a écrit un article intitulé : « Observations à propos de Primevères hybrides » ou il cite cet hybride sous son ancien nom : Primula x variabilis entre Parigné l’évêque et Ruaudin. Il y démontre l’importance du vent supérieure à celle des insectes pour que surviennent ces hybrides, et leur variation d’aspect est, pour lui, due à l’influence plus grande du pied mère : le porte-graine sur lequel est venu se déposer le pollen (qui vient du père) amené par le vent. Deux morphologies bien distinctes en découleraient selon que le pied mère est le coucou ou la primevère acaule.
La primevère rouge :
Dans de vieux jardins de plaine se reproduisent d’années en années des primevères du type acaule dont la couleur rose à rose carné prête à polémique. Il existe bien, dans la nomenclature française une Primevère rouge (Primula vulgaris subsp rubra (Sm.) Arcang.) anciennement P.Sibthorpii Hoffmanns, originaire des Balkans, qui se naturalise dans les jardins et s’échappe dans la nature, c’est donc une espèce subspontanée.
Primula vulgaris subsp rubra (Sm.) Arcang. se croise surtout facilement avec sa cousine sauvage jaune pâle (Primula vulgaris Hudson) et donne ainsi des populations d’un rose plus pâle (Primula x anglica), instables, qui finissent par être réabsorbées par la Primevère acaule.
Des auteurs anglais assurent que la Primevère rouge est arrivée vers 1638. Elle serait, pour eux, impliquée aussi dans la parenté des anciens Polyanthus de jardins : ce nom apparaît à la fin du 17ème siècle.
Primula vulgaris subsp rubra (Sm.) Arcang. apparaît en tant qu’espèce native dans la Flora Graeca (vol 2, t 84). Les dix volumes furent publiés au début du 19ème siècle par John Sibthorp, professeur de botanique à Oxford. Les planches originales furent peintes par le célèbre illustrateur autrichien : Ferdinand Bauer.
Primula x media : Cet hybride de la Primevère élevée et du Coucou est mentionné aussi en Sarthe par Ambroise Gentil, il y a été revu en 2004, mais il est bien plus rare.