Jusqu’au 19ème siècle, la Géographie, consiste surtout en une cartographie qui doit rester la plus actualisée possible, reposant sur des mesures précises prises dans un espace en deux dimensions, plat. Elles est ainsi une notion abstraite, indépendante de la vision humaine, notre perception visuelle restant partielle, anecdotique bien qu’en trois dimensions. Dès que sur une carte ancienne, on voit figurer par exemple, des montagnes ou des monuments figurés un peu de trois quart, on peut commencer à parler de Chorographie. On pourrait ainsi dire que la Chorographie ‘humanise’ la Géographie. Les cartes anciennes étaient peuplées de ces détails ajoutés qui permettaient aussi de pallier à une insuffisance de données cartographiques laissant des blancs sur les terres inconnues. Par la suite, les cartes devenant de plus en plus détaillées, le domaine de la Chorographie s’est déplacé ; c’est devenu l’apport de dessinateurs croquant sur place les paysages, les villages et même les habitants, et leurs modes de vie. C’est donc forcément une vision plus locale, la chorographie ne prétend pas donner une vision générale sur une seule image, elle multiplie les points de vue en une somme de représentations diverses qui peuvent être un apport à la géographie mais aussi bien à l’ethnographie, à la botanique, etc…
C’est dans cet esprit, je crois, qu’est née cette Commission Chorographique en Colombie qui commença ses travaux en 1850, chargée d'étudier la géographie, la cartographie, les ressources naturelles, l'histoire naturelle, la culture régionale et l'agriculture de la Nouvelle-Grenade.
L’ambiance du campement de la Comisión Corográfica à Yarumito, province de Soto est représentée dans l'aquarelle ci-dessus de Carmelo Fernandez (1809-1887), devenu le premier dessinateur de la Commission chorographique.
Du même artiste, la vue sur le détroit de Furatena sur la rivière Minero, dans la province de Vélez montre Fura et Tena, deux sommets imposants qui s'élèvent brusquement de la rivière Minero. La légende de Fura et Tena est le mythe de la création des Indiens Muzos, qui ont habité ce territoire riche en émeraudes pendant des siècles.
D’Henry Price (1819-1863), peintre et musicien britannique qui reprend le flambeau après Carmelo Fernandez, pour la troisième expédition, en 1852, j’avais envie de vous montrer cette belle vue de la ville de Santa Rosa de Osos, dans la province d'Antioquia.
D'Henry Price: La cascade de Guadalupe, dans la province de Medellín et une vue panoramique du confluent de la rivière Grande et de la rivière Chico, province d'Antioquia.
L’ingénieur et géographe italien Agostino Codazzi (1793-1859), un des cofondateurs de cette commission chorographique, combattit aux côtés de Simón Bolívar. Il est ici en train de prendre des mesures sur le plateau d'Herveo dans la province de Cordoba, comme il est indiqué en légende sur cette aquarelle d’Henry Price.
Manuel María Paz (1820-1902) le troisième contributeur, est l’auteur des aquarelles suivantes montrant deux points de vue naturels, une vue sur les Andes, et une cascade légendaire ‘l'Excomulgado’ (l'excommunié), puis une scène assez frappante de portage au-dessus d’un torrent !
Pour finir, toujours de Manuel María Paz, une technique ancestrale de lavage de l'or, dans la province de Barbacoas, puis le pont sur la rivière Ingará, Province de Chocó, qui semble bien rudimentaire, fait de bois et de lianes utilisées comme liens et cordes ; ces ponts enjambaient des rivières et ruisseaux impétueux.
Les dessins et aquarelles de terrain de Carmelo Fernandez, puis de Henry Price, et ensuite de Manuel María Paz sont conservés à la Bibliothèque nationale de Colombie. J’ai repris beaucoup de texte des légendes sur ce site où vous pouvez voir d’autres aquarelles :
Colombie, commission chorographique
Sur la notion de Chorographie différente de celle de Géographie, un article très intéressant:
https://topophile.net/savoir/le-lieu-chorographique/